Sport et Santé

Rapport congrès anunuel 2017

Atelier de la relève, 8 février 2017, ETH Zurich

L’atelier de la relève, proposé dans le cadre du 9e congrès annuel de la 4S à Zurich, avait pour thème “How to turn an important idea into important science: From experimental design to peer-review“. Sous la direction de la professeur Dr Nicole Wenderoth en collaboration avec le Dr Mirko Schmidt, responsable du secteur promotion de la relève de la 4S, plusieurs points portaient sur la manière dont les jeunes scientifiques peuvent se profiler et se distinguer dans une communauté scientifique compétitive. Puisque seuls 6 des 10 participants annoncés étaient présents, le travail a pu être réalisé dans une excellente proportion d’enseignants et d’étudiants et avec un bon encadrement individuel.
L’après-midi a démarré avec la question “Why are you a cool scientist?“. A l’aide des réponses mentionnées, les participants ont développé conjointement, dans un premier bloc, les points auxquels il faut veiller lors de l’évaluation d’un curriculum vitae. Là, on a montré, entre autres, que de plus en plus souvent les personnes qui siègent dans les comités de nomination et d’évaluation jugent un candidat potentiel uniquement selon des critères dits “objectifs“. Aussi, une discussion critique a été menée sur l’ensemble des critères objectifs, d’une part pour en reconnaître les avantages et les désavantages, mais également pour mieux connaître les nécessités actuelles de la communauté scientifique.
Dans les deuxième et troisième blocs, les participants ont passé sous la loupe les nécessités auxquelles est soumis l’auteur d’une publication scientifique, avant d’apprendre de Nici Wenderoth les critères selon lesquels une publication est évaluée dans diverses revues prestigieuses. Il a été particulièrement intéressant d’apprendre qu’une publication peut tout à fait être refusée par le rédacteur en chef, même si un critique la compte parmi les “very good paper, top 70 % in this specific field”. Cela explique aussi qu’une publication soit “rejected” malgré que l’auteur n’ait obtenu en retour que des “minor comments”.
A la fin du workshop, les abstracts des participants ont été jugés par Nici Wenderoth et Mirko Schmidt, et évalués sur la base des contenus élaborés. Après la “nourriture spirituelle“ de l’après-midi, la soirée s’est terminée par un riche apéritif avec les membres de la conférence du réseau d’études en sport suisse.
Un chaleureux merci ici à tous les participants pour la réalisation impeccable de ce workshop passionnant. Un merci particulier à la professeur Dr Christina Spengler et au Dr Mirko Schmidt pour le travail d’organisation, ainsi qu’à la professeur Dr Nici Wenderoth et au Dr Mirko Schmidt pour la mise en oeuvre.

Rapport du 9e congrès annuel de la 4S

9 - 10.2.2017, Campus Hönggerberg, ETH Zurich - SPORT ET SANTE

Après la rencontre organisée l’année passée sous le titre “Sciences du sport, au singulier ?”, le thème choisi cette année pour le congrès annuel de la 4S était “Sport et santé”. L’équipe organisatrice de l’ETH Zurich a offert un vaste programme étalé sur deux jours, auquel ont participé 196 scientifiques du sport. La présidente du congrès, la professeur Nicole Wenderoth, et son équipe, pour laquelle il faut souligner tout particulièrement l’engagement de Anni Kern, sont parvenues à mettre sur pied un programme remarquable et diversifié. Au nom de toute la 4S, nous tenons ici à leur adresser tous nos compliments pour l’organisation exceptionnelle de ce congrès.
L’attractivité du congrès de cette année trouve sa preuve dans les quatre remarquables conférences, les 18 sessions organisées thématiquement, les 36 présentations poster, la nouvelle présentation Speed-Poster et les 5 présentations de haute qualité en finale du prix de la relève de la 4S.

www.sgstagung2017.ch

Conférences principales (Présentations Keynote)

Afin de saluer la prestation des intervenants principaux, il y a lieu de revenir ici brièvement sur quelques unes des idées présentées.

Professeur Dr Walter Herzog : Optimizing Sport Performance through Muscle Mechanics

Dr Walter Herzog, professeur de biomécanique à l’université de Calgary, mène ses recherches sur l’appareil moteur des systèmes biologiques. Sa conférence traitait principalement la question de savoir si et comment la performance sportive peut être expliquée et optimisée au moyen des propriétés de la mécanique des muscles. Le professeur Herzog a commencé son exposé en montrant de manière saisissante que les longueurs des fascicules des fibres musculaires peuvent s’adapter à une charge chronique et, par conséquent, que des rapports force-longueur spécifiques au sport peuvent se former. Ainsi, les cyclistes montrent des forces importantes lorsque le rectus femoris est court, tandis qu’on observe des forces importantes chez les coureurs quand le même muscle est long.
Le professeur Herzog a construit la seconde partie de sa conférence partant de l’observation d’une particularité dans la technique en skating au ski de fond : pour des vitesses inférieures à 12 km/h et supérieures à 24 km/h, les skateurs appliquent la technique 2:1, tandis qu’entre 12 et 24 km/h, ils appliquent la technique 1:1. Cette particularité, qui fait que la même technique est appliquée pour des vitesses très basses et très élevées, a été étudiée par le professeur Herzog. A l’aide de nombreuses études, il a montré que la technique 1:1 conduit à une baisse de l’absorption d’oxygène par rapport à la technique 2:1 pour des vitesses autour de 15 km/h, alors que la technique 1:1 est moins efficace que la technique 2:1 pour des vitesses plus basses et plus élevées. Le professeur Herzog a également présenté, de manière claire et compréhensible, que la longueur des bâtons de ski à la double poussée classique générait une baisse de l’absorption d’oxygène. Etant donné que la longueur des bâtons est désormais fixée par la FIS, cette connaissance scientifique ne peut malheureusement pas avoir d’influence sur la performance des athlètes. Par contre, il semble qu’un “entrained breathing” - la synchronisation du mouvement et de la respiration - génère une diminution de 4-5 % de l’absorption d’oxygène, ce qui explique pourquoi les athlètes et les entraîneurs privilégient des techniques de respiration appropriées. 

Prof. Dr Erich Müller : Biomechanics in Alpine ski racing: a challenge on performance and safety!

L’exposé du Dr Erich Müller, professeur à la faculté des sports et des sciences du mouvement de l’université de Salzbourg et vice-recteur de l’université, évoquait le défi biomécanique du ski alpin. Le professeur Müller et son équipe effectuent des recherches dans le champ de tension entre “réduction des accidents dans les courses de ski” et “augmentation des performances dans les courses de ski”.
D’intenses recherches sont menées à l’université de Salzbourg sur la “coordinative affinity”, afin d’améliorer les performances en ski. Le principe de base de l’entraînement pour les skieurs de pointe repose sur trois piliers : l’entraînement des “basics” - par exemple en salle de fitness, l’entraînement des “specific basics” sur des appareils spécifiques d’entraînement et de musculation, et l’entraînement sur la neige. Des profils d’exigence et de charge ont été élaborés ces dernières années, dans le but d’entraîner les “specific basics” de manière la plus efficace possible. Ainsi, on a montré, par exemple, qu’au slalom, le ski intérieur subi une charge presque aussi grande que le ski extérieur, alors qu’au slalom géant, la jambe extérieure exerce une forte dominance. De la même façon, on a évalué les accélérations excentriques dans diverses disciplines par des mesures complexes sur le terrain, afin de développer des programmes d’entraînement off-snow idéaux. Cette recherche a abouti au développement d’une nouvelle espèce de dynamomètre pour les membres inférieurs, permettant la simulation des forces et des amplitudes de mouvement en tant que “specific basics”. Un simulateur de ski a aussi été modifié de manière à ce que les forces de réaction au sol et la cinématique de diverses disciplines puissent être simulées de façon la plus réaliste possible à l’entraînement off-snow. Cette “coordinative affinity” permet aussi désormais qu’un entraînement HIT soit possible sur un simulateur modifié, dont les effets peuvent être, selon toute probabilité, très bien reproduits dans la réalité.
Dans la deuxième partie de son exposé, le professeur Müller a évoqué le taux élevé de blessures dans les courses de ski ainsi que la tentative fructueuse de réduire ce taux. Sur la base d’une incidence, par saison, de 36 blessures pour 100 athlètes, l’équipe du professeur Müller a élaboré, sur mandat de la FIS, un projet de réduction de l’incidence des blessures. Dans un premier temps, elle a évalué les facteurs de risques typiques des blessures en ski : équipement, conditions de neige changeantes, vitesse et piquetage, préparation physique. Sur cette base, des recommandations ont été élaborées, qui ont influencé de façon déterminante la réglementation de la FIS, notamment sur le piquetage ou les dimensions des skis pour le slalom géant. Par exemple, l’aggressivité des skis ou le “self-steering effect”, ont pu être réduits par la modification des skis de slalom géant. Dans un troisième temps, une évaluation a été réalisée sur l’influence du changement de skis. Les skieurs ressentent les nouveaux skis de slalom géant comme étant moins agressifs. En même temps, l’impact des forces est moins grand et le taux des blessures, après l’introduction de la nouvelle génération de skis, est tombé à 36 %. 
Dans la dernière partie, le professeur Müller a fait part de son incompréhension face à la décision de ré-autoriser dès la saison 2017/18 l’usage de skis à faible rayon pour pallier aux problèmes de dos de nombreux skieurs. De nombreuses mesures prouvent en effet que la nouvelle génération de skis est à l’origine des cas de problèmes de dos et qu’il est certain que l’incidence des blessures va à nouveau augmenter.

Professeur Dr Romain Barrès : Epigenomic Responses to Exercise in Muscle and Gametes

Dans une conférence de grande qualité, Romain Barrès, professeur au Novo Nordisk Foundation Center for Basic Metabolic Research à l’université de Copenhague, a traité de l’influence de l’activité physique sur les réponses épigénétiques dans les cellules musculaires et reproductives. Il a débuté son exposé en citant son compatriote Jean-Baptiste Lamarck, qui a décrit le lien entre les changements physiques à long terme et les conditions environnementales, et dont la théorie a longtemps été réfutée. Lamarck prétendait que les organes s’adaptaient au comportement et que ces adaptations étaient transmises aux générations suivantes. Mais c’est seulement depuis peu qu’on cherche à savoir comment l’épigénétique influence la lecture (transcription et traduction) du génome, et donc comment l’épigénétique influe sur le phénotype. Ainsi, le professeur Barrès a mis en lumière la question de savoir si l’activité sportive entraîne une modification de l’expression génique.
Dans la première partie de son exposé, le professeur Barrès explique de façon très claire que l’activité physique aiguë exerce une influence directe sur l’activité des gènes, par le biais d’une modification de la méthylation de l’ADN. Si la séquence d’ADN reste toutefois inaltérée, les changements de la méthylation peuvent néanmoins influencer l’apparence (le phénotype) de la génération suivante, du fait que diverses fonctions biologiques souhaitables peuvent être transmises à la génération suivante. Cette opération doit donc être clairement distinguée des mutations génétiques non souhaitables. L’équipe du professeur Barrès a pu démontrer dans de nombreuses publications scientifiques plusieurs effets directs de l’activité physique sur la méthylation de l’ADN. Ainsi, par exemple, l’activité physique entraîne chez les personnes obèses non seulement des modifications métaboliques, mais aussi des changements du gène GREM1 dans les cellules satellites des muscles.
Dans la deuxième partie de l’exposé, la question était de savoir si et comment de telles modifications génétiques peuvent influer sur la génération suivante. Sur la base d’une publication de 2016, il a été montré que les épigénomes des sujets minces et obèses sont très semblables en ce qui concerne le positionnement des histones, mais que les expressions de l’ARN et la méthylation de l’ADN divergent sensiblement entre les deux groupes de sujets. On peut en outre observer de gros changements de la méthylation de l’ADN dans les spermatozoïdes au niveau génétique du contrôle de l’appétit, lorsqu’une chirurgie de obésité est pratiquée. Pour un scientifique du sport, il est particulièrement intéressant d’apprendre que l’entraînement d’endurance entraîne une modification de la méthylation de l’ADN, en particulier des gènes responsables du développement cérébral.
Pour terminer, le professeur Barrès a relevé que la pression sélective chez l’homme n’est pas basée sur le développement d’un système musculo-squelettique des plus performants, mais que l’objectif a été, et demeure toujours, le développement du cerveau.

Professeur Dr Benedicte Deforche : Environmental determinants of physical activity and health

Benedicte Deforche, professeur au département de la santé publique à UGent (faculté de médecine et des sciences de la santé) et membre de la section “activités physiques, nourriture et santé” de la Vrije Universiteit Brussel, a parlé de l’influence des déterminants environnementaux sur la santé et l’activité physique. Sa question centrale était de savoir si et comment on peut encourager un mode de vie sain par des modifications simples ou complexes de l’environnement. A ce titre, elle s’est essentiellement concentrée sur des questions comme celles de savoir comment concevoir des villes pour qu’elles soient des espaces propices à l’activité physique.
Dans le cadre de l’étude BEPAS (Belgian Environmental Physical Activity Study), une série de publications a établi quels critères devraient être particulièrement importants et comment les pondérer, afin que les gens soient physiquement actifs. Le premier critère est le “land-use mix”, car ce n’est pas vrai que les gens se déplacent automatiquement moins dans un environnement urbain que dans un milieu rural. Le deuxième critère, la “residential density”, affirme qu’en cas de densification démographique élevée, les distances au cercle de connaissances sont plus courtes, ce qui fait que les gens se déplacent probablement plutôt à pied qu’en voiture. La “street connectivity” constitue le troisième critère, car la question “A quel point est-il facile d’aller de A à B ?” pourrait aussi jouer un rôle sur les habitudes physiques. L’équipe du professeur Deforche a fait l’hypothèse que les “low walkable neighbourhoods” se distinguent selon les critères suivants : “low residental density“, “low street connectivity“ et “low land-use mix“. Dans un premier temps, elle a sélectionné 28 zones et analysé la “walkability” en détail. Ensuite, elle a interrogé (questionnaire) et mesuré (accéléromètre) 1150 personnes, afin de calculer le rapport entre l’activité physique et la “walkability”. L’enquête a montré qu’il y avait chez les jeunes adultes et les personnes âgées un lien clairement positif entre la “walkability” et la mesure de l’activité physique. Au yeux du professeur Deforche, la tendance à construire toujours plus de centres commerciaux au détriment des commerces de quartier est évidemment à montrer du doigt. Car chaque obstacle perçu - des chemins à parcourir entre les magasins de détail, etc. - pousse les gens à bouger un peu moins.
La deuxième partie de l’exposé a commencé par la présentation des données de l’IPEN (International Physical Activity and the Environment Network). Ce réseau étudie, entre autres à l’aide de modifications d’images, les circonstances dans lesquelles les gens se déplacent le plus probablement (par exemple, piste cyclable avec marquage blanc vs piste cyclable avec marquage rouge vs piste cyclable sans marquage spécifique). En comparaison avec l’étude BEPAS, qui doit émettre des recommandations pour les mesures urbaines à venir, l’étude IPEN a pour but d’évaluer comment des “micro-scale environmental changes” peuvent influencer les habitudes physiques. Des analyses d’images, par exemple, ont ainsi pu déterminer qu’un trottoir plat était le critère essentiel pour qu’on définisse un endroit comme “respectueux des piétons”. Toutefois, étant donné que 54 % des sujets jugent médiocre la qualité du trottoir de leur propre rue, cela pourrait être un point de départ pour des mesures de rénovation à venir. Pareillement, on a pu montrer, de façon plutôt surprenante, que ce sont les déchets abandonnés qui dissuadent le plus les gens de considérer un parc comme un environnement encourageant le mouvement.
Ensuite, le professeur Deforche a défini la mise en pratique des connaissances et posé la question de savoir si des modifications de l’environnement amèneront effectivement les gens à se déplacer plus.

Assemblée générale

La 9e assemblée générale ordinaire de la 4S s’est tenue au soir du 9 février 2017 (n=34). En marge de l’ordre du jour, envoyé au préalable à tous les membres, l’assemblée générale a été l’occasion de remercier Ophélia Jeanneret pour sa longue carrière au sein du comité de la 4S. Ophélia Jeanneret a quitté le comité de la 4S le 9 février 2017 pour des raisons professionnelles et sera remplacée par André Gogoll, dont la candidature a été approuvée à l’unanimité. En outre, les membres ont été informés des principaux changements prévus dans les activités de la 4S : le lancement en 2017 du nouveau site web de la 4S et la poursuite des démarches auprès du Fond national suisse. D’autre part, à partir de 2018, les retraités auront la possibilité de rejoindre la 4S en tant que membres passifs (pas de cotisation annuelle ni de droit de vote).
Le professeur Ernst-Joachim Hossner a informé l’assemblée de l’état actuel du journal CISS, puis terminé ses remarques avec un appel pressant à tous les membres de la 4S, afin qu’ils soumettent plus d’articles au journal.
A la suite de l’ordre du jour, sous “divers”, la question a été discutée de savoir comment mieux intégrer à l’avenir la pratique sportive à la 4S. En outre, quelques propositions utiles ont été fournies par rapport au prix de la relève, lesquelles seront discutées dans la prochaine séance du comité.